La stérilité comme symptôme. Intéressée depuis ses études de psychiatrie par la psychanalyse, ce qui a finalement décidé cette jeune femme à venir me parler c’est qu’elle n’arrivait pas à faire d’enfant avec son mari. Mariés depuis bientôt dix ans, l’attente déçue de mois en mois d’une grossesse sans qu’aucune cause médicale ne soit repérée devenait une énigme qu’elle se décida à élucider dans l’analyse, choisissant de venir rencontrer l’analyste d’une de ses amies qui voulait aussi avoir un enfant.

 

Le mari = L’homme qui fait l’enfant. Très vite elle avoue que c’est un autre homme avec lequel elle travaille qui occupe ses pensées, un homme qu’elle trouve brillant, intelligent, elle semble lui plaire tout en sachant « qu’il ne sautera jamais le pas » qu’il n’y aura rien d’autre avec lui que des jeux de séduction sur le mode de conversations vives et enjouées.

                Par rapport à la qualité des conversations qu’elle a avec cet homme elle trouve peu à peu que son mari est inculte, qu’il ne comprend rien aux jeux de mots, aux blagues, et surtout « qu’il fait sans arrêt l’enfant », elle en a assez, pourquoi s’est-elle prêtée à cela si longtemps ? Ce trait qui était plutôt amusant au début de leur relation lui devient peu à peu insupportable.

                Bien que séduisante elle se plaint de n’avoir eu que peu d’histoires amoureuses avant la rencontre de son mari, la plus importante s’était soldée par le fait d’être quittée, ce dont elle a beaucoup souffert.

 

Le frère = l’enfant qui fait l’homme. Peu à peu c’est la relation à son frère aîné qui apparaît dans des rêves qui la conduisent alors à un second aveu : alors qu’ils avaient environ  huit et dix ans ils ont eu ensemble des jeux érotiques puis des moments d’intimité sexuelle qui l’ont amenée à l’orgasme. C’est donc avec lui qu’elle a expérimenté la rencontre des corps, il a fallu qu’elle aie ses règles pour refuser fermement les rapprochements voulus par son frère. Encore maintenant celui ci bien que marié et père de famille lui fait des compliments qu’elle entend maintenant comme étant très équivoques.

 

Le couple parental : Homme Femme = frère sœur. Ces situations d’intimité avec son frère avaient lieu pendant que leurs parents partaient à leurs rituels religieux, leur mère les laissait seuls tous les deux en leur disant d’être bien sages. C’est alors qu’elle se rappelle que sa mère aimait dire en blaguant qu’elle-même et son mari, le père de la patiente, étaient frère et soeur. En effet ils s’étaient rencontrés alors qu’ils étaient tous les deux engagés dans la voie religieuse, lui s’étant engagé comme frère dans une communauté et elle religieuse, soeur donc.

 

Le fantasme de l’homme frère. Ce fantasme de frère et soeur semble trouver du côté de la mère sa source dans le lien de celle-ci à son frère aîné qui était le seul homme de sa famille car elle avait été séparée jeune enfant de sa famille pour être « mise chez les soeurs ». Le père de la patiente ayant été choisi par la mère sur ce trait d’être un frère avec lequel elle a pu avoir des relations sexuelles et faire des enfants.

                Si cette patiente se présente volontiers dans le registre hystérique, incarnant elle même le phallus, pour elle l’homme a ces traits du frère.

                Là où dans l’adolescence les conversations amoureuses étaient liées au plaisir sexuel avec le frère brillant et beau parleur, il y a eu dans sa vie d’adulte une séparation avec une vie sexuelle avec un mari faisant lui même le jeune garçon auprès d’elle mais ce n’était pas tant pour faire la mère avec lui que pour en jouir dans une équivalence homme, frère, jeune garçon et d’autre part il y avait l’homme du désir et de la conversation avec lequel aucune sexualité n’est permise. Enfin ne pas pouvoir concevoir d’enfant avec son mari peut s’entendre comme protestation au fantasme maternel : « ma mère a fait des enfants avec un frère, c’est dégôutant ». L’homme frère du côté de la fille et le frère père du côté de la mère, le ravage de la relation à la mère est ici au premier plan.

                Le noeud de la question, ce qui se détache comme un trait dans cette cure c’est l’équivalence homme frère, c’est le ravalement de l’homme au frère, elle est profondément mariée au frère même si le choix d’objet amoureux du côté du mari présente l’inverse du frère, il y a le trait jeune garçon. Il y a l’homme du désir avec lequel il ne se passa rien de sexuel et il y a l’homme avec lequel il y a du sexuel mais aucune conversation, celui qui est fixé à une position de faire l’enfant dans la relation avec sa femme.

                C’est par une suite de « faux pas » et d’analyse de ses rêves qu’elle va peu à peu apercevoir les impasses de cette équivalence inconsciente de l’homme au frère.

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