PAUTRAT, BADIOU, ZIZECK. J’apprends par le dernier Monde des Livres que mon ancien cothurne de l’Ecole nomale, Bernard Pautrat, publie un livre sur Spinoza et l’amour, Ethica  Sexualis. Dans son jeune temps, quand nous partagions la même chambre rue d’Ulm, il était derridien pur sucre. Depuis, il a jeté sa gourme, comme Derrida lui-même, d’ailleurs. Il a traduit l’Ethique avec précision, Rilke, W.H.Auden, d’autres, avec grâce, j’aime particulièrement sa traduction de Perse. Il m’a refusé une salle à l’Ecole, pour mon séminaire d’études approfondies, que j’étais allé lui demander il y a, quoi ? dix ou quinze ans peut-être. « Lacan, n’est-ce pas, n’a pas laissé un bon souvenir dans la maison, la façon dont il est parti, tu comprends… » J’ai très bien compris. J’ai refusé de remettre les pieds dans ces paludes pour « faire une conférence », comme il me le proposait, à l’intigation de Badiou, alors maître de céans chez les philosophes, à titre de dédommagement sans doute.

J’y retournerai vendredi 9 septembre pour lire le texte de Lacan que mon amie Catherine a choisi pour moi. Mais je n’en veux pas à Pautrat, homme d’institution dans l’institution, ce qui a sa logique, et, dehors, on se dissipe. J’attends de lire ce livre dès mon retour à Paris, avec le préjugé le plus favorable. Pautrat est un type très fin.

Faire l’amour à la Spinoza ? Qu’est-ce que cela peut bien être ? L’érotique more geometrico, avant Lacan, ça n’a pas donné grand chose. Après non plus, d’ailleurs. Je me souviens d’avoir écouté Badiou, dans une conférence à l’Ecole de la Cause, soulever une montagne de mathèmes pour l’accoucher d’une souris. Pourtant, Alain a une expérience que je crois très authentique, et des mathématiques et de l’amour. Il forme avec Slavoj un duo du feu de dieu, qui écume la philosophie contemporaine, et allume la jeunesse. A New York, ils sont accueillis par Josefina Ayerza dans Lacanian Ink. Josefina, lacanienne pur sucre, m’avait demandé mon accord préalable avant de leur offrir un abri. Ils logent maintenant chez elle quand ils sont de passage, elle les connaît bien.

DE RETOUR A PARIS. Pautrat a pensé à m’envoyer son livre, avec une dédicace amicale. J’éplucherai son livre dès que l’ouragan de la rentrée cessera de requérir tous mes soins. Rien n’interdit à Aurélie, ou Anaëlle, ou Clotilde, ou Deborah, toutes philosophes de formation, de me précéder. Qui parle mieux aux femmes ? Spinoza ou Catherine Millot ? Le premier morceau de cette chronique a été rédigé en Ré ; le second, à l’instant.

 

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