~DEBAT DES AUTISTES ~~

kristell jeannot

avec jean-claude maleval et judith miller

 

Kristell Jeannot ouvre le Débat des Autistes et lance l’alerte : pendant l’été un questionnaire a été envoyé aux institutions et professionnels de l’enfance et de la santé, leur demandant de se prononcer sur un guide de « bonne pratique » concernant l’« autisme et autres troubles envahissants du développement »…

Les informations, réactions, propositions que ce débat susciteront sont à adresser à kristelljeannot@gmail.com pour la rubrique LQ- Débat des Autistes.

Le retour de la clinique des « comportements-problèmes »

Au début du mois de juillet 2011, les établissements accueillant un public d’enfants

« autistes et TED» ont reçu un Guide de recommandation de bonne pratique intitulé :

–  Autisme       et         autres  troubles          envahissants   du        développement  interventions éducatives et thérapeutiques coordonnées chez l’enfant et l’adolescent –

Ce « document préparatoire » de cinquante pages, financé par des fonds publics, a été demandé par la Direction générale de la santé (DGS) et la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) dans le cadre de la mesure 9 du Plan Autisme 2008-2010. Il a été réalisé par la Haute autorité de santé (HAS) et par l’Agence nationale d’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ANESM).

Les recommandations qui y sont formulées, s’ordonnent à partir des théories cognitivo- comportementales. Toutes les manières d’être d’un enfant autiste y sont abordées, non pas comme des modes d’expression, voire des traces de leur manière de faire avec le réel – ou de ne pas savoir y faire, nécessitant un accompagnement vers des inventions, des bricolages opérants –, mais comme des « comportements-problèmes » à éradiquer, pour ne pas troubler l’ordre normatif, par les moyens répressifs existants : médicamenteux, techniques psycho-éducatives comportementales, lieux d’isolement.

Bien sûr, la vitrine du guide est pleine de bonnes intentions : améliorer les pratiques en évaluant les besoins et les ressources de l’enfant et de sa famille, permettre aux professionnels d’évaluer leurs pratiques, en mettant à disposition des outils à cet effet.

Même si ce guide est présenté comme un travail préparatoire, il est à craindre que cette guidance glisse vers une directive ces prochaines années au regard de certaines formulations alambiquées. Nous avons jusqu’au 9 septembre 2011 pour répondre à un questionnaire censé permettre d’évaluer la pertinence du contenu du guide, soit de ce qui y est recommandé. – échelle de satisfaction et zones de texte libre. J’utilise le « nous », mais seuls les établissements et les associations sont invités à répondre à ce questionnaire, alors même que les professions libérales – et donc les psychanalystes et les psychologues orientés par la psychanalyse – sont explicitement citées comme étant concernées : « les recommandations (…) concernent tous les secteurs d’exercice des professionnels (exercice libéral (…)) ».

Je renvoie aux pages 26 et suivantes du guide pour prendre connaissance de la manière selon laquelle            l’orientation analytique est considérée et pour voir quelles techniques sont préconisées.

L’orientation psychanalytique n’a pas à chercher à se ranger dans les casiers du questionnaire réalisés par des experts ignorants de la valeur de la clinique du sujet. Cependant, ne convient-il pas de dénoncer ce qui apparaît dans ce document ? Pour l’instant, la psychanalyse est sur la sellette. Dans « l’état actuel des connaissances », les dits experts ne reconnaissent pas la pertinence de son approche, ce qui, à terme, pourrait glisser vers la conclusion recommandée pour d’autres approches : « Il est recommandé de ne plus les utiliser ».

Sans voir aussi loin : le rapport recommande, en outre, des passations de tests régulières. Devant mon refus de telles pratiques, je me suis déjà vu répondre que si je ne voulais pas faire passer de tests, il ne fallait pas travailler en institution. Comment ne pas dénoncer ce rapport qui porte aux nues ces pratiques stériles, voire néfastes, pour l’enfant lui-même ?

Je pense, quant à moi, que l’idéal serait de ne pas répondre au questionnaire directement, de refuser de ranger notre pensée dans leurs petites cases, mais d’y répondre en se mobilisant et en dénonçant les points de ce document qui portent atteinte à l’éthique défendue par la psychanalyse et, d’une manière plus pragmatique, au respect de ces enfants, de ces sujets que l’on préconise de forclore dans leur identité propre, au bénéfice de la norme du bien vivre en société. Mais cela reste une hypothèse. Je serais heureuse de pouvoir lire d’autres réflexions, afin que cela puisse étayer ma manière d’appréhender ce « guide de recommandation » et, peut-être, amener à une prise de position commune face à celui-ci, du moins à un débat d’idées. Kristell Jeannot

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Pour prendre connaissance du guide et du questionnaire :

Questionnaire : Consultation publique – Autisme et autres troubles envahissants du développement. (1)

http://consultation.has-sante.fr/autisme_6dh/Autisme.htm

Guide de recommandation de bonne pratique – Autisme et autres TED : interventions éducatives et thérapeutiques coordonnées chez l’enfant et l’adolescent :

HAS recommandations prov 2011

 

 

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